Déclaration SUD FPA au CCE du 3 et4/09/2019 – Rapport du médiateur
Qu’allons nous vivre lorsque nous serons évalués à travers une plateforme ? Ou « des étoiles plein la gueule »
Depuis des années déjà on essaie de nous inculquer une démarche qualité qui passe par l’inévitable enquête de satisfaction et qui aurait pour vertu de nous faire « reconnaître » par les financeurs avides de normes et soucieux de procédures.
Cette démarche qualité a un critère particulièrement intéressant pour un manager, celui de la notation formateur, d’autant plus si « l’enquête » permet le verbatim. Verbatim qui donne à chacun la possibilité de se défouler et de plus anonymement. Cette enquête a déjà été dénoncée mais malgré tout elle perdure dans les régions.
En son temps nous avions dénoncé l’outil de remise en cause personnelle (ou personnalisée ?)et de RPS que représente cette enquête. Si elle était utilisée dans le bon sens, il y longtemps que les hébergements seraient refaits à neuf, les machines des formations réparées et la dite autoformation ré-interrogée. Mais sur ces sujets, il y a guère de changement.
On se rend bien compte qu’en réalité nos moyens et notre pédagogie sont appréhendés selon les critères du moins cher ou du « low cost » par nos acheteurs mais qu’en revanche cette démarche garde l’énorme avantage, pour nos directions, de nous maintenir dans le doute et sous la pression permanente de l’évaluation, notamment celle des stagiaires. Ça leur donne aussi la possibilité de mettre en difficulté n’importe qui parmi ceux qui sont en contact direct avec le public.
Mais cette fois, on passe une étape supplémentaire puisque la nouvelle réforme institue l’évaluation des organismes de formation par les stagiaires au même titre qu’un restaurant ou une chambre d’hôtel, entre 0 et 5 *. Et, bien sûr, si l’Afpa est mal notée ce ne pourra être qu’à cause du personnel.
Cela relève aussi de la manipulation du client/stagiaire a qui l’on fait croire que son avis pourrait être pris en compte dans le cadre de l’amélioration de la formation qu’il vient de suivre.
L’autre point extrêmement négatif est la relation client/fournisseur instituée par ce système. Le stagiaire étant le client et le formateur(trice) le fournisseur.
Dans notre cas il ne s’agit plus de colis livré à temps ou en bon état, d’un appel téléphonique dérangeant ou d’un retard de RdV.
Pour nous, rien de ponctuel, rien de linéaire, mais un « service » et une relation sur le long terme apte à se dégrader au fil du temps compte tenu des conditions d’exercice de notre travail. Le jugement en sera d’autant plus personnalisé s’il est calculé sur un petit nombre (taille du groupe).
Les stagiaires seront en capacité de faire une forme de chantage à l’* (étoile) instaurant ainsi une pression sur le personnel. Même si ce chantage n’est pas exprimé formellement, l’agent se mettra en situation de « fournisseur » malgré lui pour ne pas subir le « mécontentement caricaturalement traduisible en *(étoile) » et pouvant se retourner contre lui.
Et dans ces circonstances, toute la valeur de notre acte pédagogique s’effondre.
La formation, et sa réussite, s’opère régulièrement dans la confrontation conflictuelle. Le conflit cognitif et socio-cognitif étant le principe de la pédagogie. La confrontation, quelquefois agressive, est constitutive de l’acte d’apprentissage et de formation . On la trouve dans :
- la représentation du métier. Quand des stagiaires ont déjà un peu pratiqué le métier il peut être compliqué de leur faire revoir leur vision.
- la nécessité d’intégrer des connaissances théoriques (qui souvent permettront l’évolution).
- la difficulté d’encadrer des personnes qui ne sont pas toujours là de leur plein gré ou mal orientées.
- La justification (car remise en cause) des exercices que l’on peut proposer.
- Dans l’évaluation du travail selon nos critères et notre regard de professionnel.
Avancer ensemble ce n’est pas dire « amen » à tout.
Ces différents éléments ne font souvent sens pour les stagiaires qu’après des passages en entreprise plus conséquents qu’une PE. Il n’est pas rare que des stagiaires disent, bien après leur sortie de formation, que nous avions raison. Mais pas toujours à l’issue de la formation.
Si nous n’avons plus cette capacité à tenir cette confrontation nous sommes décalés de notre acte de formation.
Ce système de notation nous coupera forcément les ailes, nous fragilisera, en nous exposant en permanence (mais encore plus qu’aujourd’hui) aux volontés des stagiaires plutôt qu’aux exigences d’un métier. Et que dire pour les formateurs de passage sous la pression permanente du contrat suivant.
12 septembre 2019 12:37