“L’Elysée prépare un plan d’urgence pour résorber le stock d’emplois non pourvus”
Article paru dans le Monde du 20/06/2013
Pour tenter d’inverser la tendance : les offres d’emploi non pourvues. Le but ? “Faire en sorte que 100 000 offres trouvent par tous moyens une réponse”, avait expliqué François Hollande lors de l’émission “Capital” sur M6, dimanche 16 juin. Dans son discours d’ouverture de la deuxième conférence sociale de son quinquennat, jeudi 20 juin, où il a insisté sur la “bataille pour l’emploi” et la “préparation de l’avenir”, le président, qui considère qu’il y a là un “enjeu de mobilisation à très court terme”, a ainsi annoncé un dispositif de rapprochement entre les besoins des entreprises et les demandeurs d’emploi.
“C’est surtout par la formation qu’on pourra y parvenir”, explique-t-on à l’Elysée où l’on vise en particulier des métiers qui supposent un mininum de qualification. Le chiffre était encore en cours de calage jeudi matin, mais l’on évoque plusieurs dizaines de milliers de demandeurs formés entre la fin de 2013 et la fin du premier semestre 2014. Des institutions, comme la CFDT, l’association des régions de France (ARF), et des personnalités comme Yves Barou, président de l’AFPA, premier organisme de formation, ont plaidé pour un plan d’urgence sur la formation ces dernières semaines.
Selon Les Echos, le ministre du travail aurait par ailleurs obtenu une rallonge budgétaire d’un milliard pour 2014. “Il y aura un abondement des moyens du ministère du travail, qui accompagnera la montée en charge d’un certain nombre de dispositifs déjà budgétés ou bien méritant d’être réabondés parce que les objectifs vont être revus à la hausse, surtout sur les emplois aidés”, confirme l’Elysée.
Les chiffres précis du nombre d’offres non pourvues sont mal connus, mais le phénomène est réel. Selon Pôle emploi, 116 000 offres ont été retirées faute de candidats en 2012. Le Medef estime qu’environ 300 000 recrutements échouent chaque année pour cette raison. Ce qui n’est pas négligeable mais reste marginal face au nombre total de recrutements, supérieurs à 20 millions.
Ces dix dernières années, plusieurs plans ont été présentés, notamment par François Fillon lorsqu’il était ministre du travail en 2003 ou par Nicolas Sarkozy en 2008, qui a instauré le principe de l’offre raisonnable d’embauche, qui se doit d’être acceptée par les chômeurs. Avec peu de succès.
“MOLLASSON”
L’idée revient sur la table car, de l’avis général, la grande réforme de la formation professionnelle ne devrait pas avoir d’effets avant plusieurs années. Face à l’explosion du chômage, “il est nécessaire d’avoir un plan d’urgence sur la formation”, plaide notamment Pascale Gérard, vice-présidente PS de la région Provence – Alpes – Côte d’Azur et chargée du dossier à l’ARF. Former 100 000 chômeurs pour une durée de six mois, coûterait au bas mot un milliard d’euros selon un bon connaisseur du dossier. “L’idée d’un plan coup-de-poing est bonne, mais on peut se demander si le système de formation français, un peu mollasson, pourra mettre en oeuvre un tel plan”, plaide-t-il.
Lors de la conférence sociale, le Medef devrait arriver avec une liste de secteurs en besoin. Le problème est que des métiers peu qualifiés comme la cuisine ou l’aide à domicile font partie des plus difficiles à recruter, selon les données de Pôle emploi. “Dans ces cas-là, les difficultés de recrutement proviennent davantage des horaires et des conditions de travail que d’un manque de chômeurs qualifiés”, convient-on au sein de l’organisme. Reste que des postes qualifiés dans l’industrie, comme la chaudronnerie, dans la construction, ou dans certains services sont aussi sur la liste.
Envoyer massivement des chômeurs en formation présenterait l’avantage de les faire sortir des chiffres du chômage, au moins pendant ladite formation. “Il ne faut pas considérer que c’est de l’accompagnement social ou du traitement statistique de la courbe du chômage”, dément-on à l’Elysée, où l’on n’a pas renoncé à la promesse d’inverser la courbe du chômage d’ici à la fin de l’année.
Jean-Baptiste Chastand et David Revault d’Allonnes
20 juin 2013 10:54